samedi 27 octobre 2012

L’information : un secret bien gardé ?



Dans notre société française comme dans les entreprises, le secret fait partie intégrante de notre culture et du management. Il y a ceux qui savent et ceux qui sont maintenus dans l'ignorance.

A force de plaidoyer pour la transparence, qui est toujours le masque de quelque chose d’autre de moins avouable, à force de céder aux sirènes de l’open data qui semble exiger toujours plus de révélations, il apparaît nécessaire de conduire une réflexion sur les limites de cette communication informelle, exponentielle et souvent assez cynique. Le secret est un des moteurs de la société qui repose sur un rapport ambigu : chacun conteste le secret des autres et chacun protège ses propres secrets. Michel Foucault l’avait démontré, le fait d'avoir une information que d'autres n'ont pas est source de pouvoir. Pas étonnant que derrière les enjeux de la transparence se cachent ceux de la gouvernance. Et par extension, pas étonnant que derrière les enjeux du « tout information », se cache sans nul doute, des velléités de contrôle sur les consciences. C’est comme si quelqu’un nous disait : « regardez ceci, mais ne regardez pas là »…
Il convient de rappeler grâce à ce petit graphique les phénomènes de déperdition de l’information dans les sociétés et les organisations. A chaque étape, le dirigeant, le journaliste, le responsable politique, estiment que les étages inférieurs (le citoyen, le salarié) n’ont pas besoin de savoir la totalité de l’information, non pas parce qu’ils ne sont pas aptes à la comprendre mais parce qu’ils croient qu’en délivrant la totalité d’une information ils perdront leur statut de dirigeant, de journaliste, de responsable politique…


La « tyrannie de la transparence » imposée aux Etats et aux institutions par un Julian Assange de Wikileaks, accompagne la perte de confiance envers les dirigeants, les médias traditionnels, les élus. Ainsi, le secret participerait-il d'une défense statutaire d'une hiérarchie, d’un pouvoir ? A l'inverse, le nouveau pouvoir né d'Internet et des réseaux sociaux ne tire-t-il pas sa légitimité de sa capacité à partager l'information pour devenir influent et faire triompher collectivement des idées et d’exercer, même provisoirement, un contre-pouvoir ?
Pourtant il paraît légitime que les organisations au sens large doivent conserver leur liberté de révéler ou non à la presse, leurs produits, leur organigramme, leur culture ou leur histoire, c’est-à-dire ce qui fait le cœur de leur patrimoine. Autre aspect : il est curieux dans notre pays que, dès lors que la question de la vie privée ou du salaire est posée, tout le monde se réfugie dans la confidentialité alors que la masse des français se régalent des coucheries de nos politiques ou des frasques médiatiques de DSK. Au nom de la transparence, les français stigmatisent la rémunération des dirigeants, les combines politiciennes, les prévarications en tout genre. En fait, les français ne savent rien. La traditionnelle courroie de transmission que jouaient les médias n’existe plus. Nos concitoyens ne sont plus informés. On leur jette en pâture quelques bribes pour les occuper et penser à autre chose tout en leur disant que la transparence est reine.

Perméabilité à tous les étages
S'il est un domaine où la frontière entre secret privé et transparence publique n'est pas facile à tracer, c'est bien celui des données sur Internet. Les individus veulent à la fois dévoiler des secrets pour créer des liens ou participer à un contre-pouvoir («open data») et, en même temps, demandent à être protégés des risques liés à une perméabilité grandissante entre vie publique et vie privée. Pour l'heure, le droit n'a pas clairement fixé les limites et le régulateur doit déterminer «sans idéologie» le cadre de cette relation. Le secret se fait au bénéfice de certains acteurs qui veulent accéder à des données personnelles pour les valoriser à leur profit. C’est un peu le mythe de Faust qui est réinventé toutes les minutes sur les réseaux sociaux. « Donnez moi le pouvoir de m’exprimer, mais je n’accepte pas de tout dévoiler de ma personne ». L’illusion, avec la multiplication des outils d’information et des médias sociaux, serait de croire que tout se sait sur internet. C’est complètement faux. Les pseudonymes se multiplient, les rumeurs s’amplifient, les vraies fausses révélations côtoient les scoops. C’est le fameux buzz. Il suffirait pourtant de juste se poser la question : « pourquoi je retweet une information ? » Est-ce pour exister ? Est-ce parce que je crois que cette information est importante ? Capitale ? Où simplement pour combler le vide démocratique que les politiques ont confisqué aux citoyens ? Sans nulle doute, chacun aura sa propre réponse. Il n’empêche qu’il y a à l’évidence des stratégies d’influence qui sont mises en œuvre comme le démontre bien David Réguer dans son ouvrage « e-réputation, manager la réputation à l’heure du digital ».
Désormais qui croire ? 


Sources :
 

mardi 23 octobre 2012

Non à la toute puissance des experts « lanceurs d’alerte » !

La France est un pays curieux. Dès qu’il s’agit de lutter contre des moulins à vent, nous avons la capacité à sortir des experts de nulle part. Et qui n’ont jamais rien dit. 


Les professeurs Debré et Even en guerre contre l’abus de médicaments, Irène Frachon en croisade contre les laboratoires Servier, le professeur Séralini et son étude démontrant la nuisance des OGM, plus anciennement André Cicollela et son combat contre les effets des ethers de glycol, Pierre Meneton attaqué en justice parce qu’il avait dénoncé le poids des lobbies dans le domaine de la santé : la liste est très longue. Et très curieusement, - mais n’est-ce pas une spécificité française ?, tous ces lanceurs d’alerte, ont été, à un moment ou à un autre, déboutés, condamnés, exilés ou ostracisés. Pourquoi ? 

L’une des premières explications est que ces lanceurs sont à considérer comme des trublions de l’ordre établi. Parce qu’ils savent trouver des relais médiatiques (Debré et Even et l’hyper médiatisation de leur livre sur les médicaments inutiles ou dangereux), parce qu’ils savent trouver des relais politiques (Irène Frachon et le soutien constant du député Gérard Bapt), parce qu’ils répondent à une demande récurrente de la société (Séralini et les interrogations sur les OGM), ces lanceurs d’alerte occupent un terrain délaissé par la puissance publique. Notons à ce titre les errances successives des autorités de santé et les multiples crises sanitaires depuis les années 70, de l’hormone de croissance à l’affaire du sang contaminé en passant par les effets de l’amiante. Faire bouger les lignes, remettre en question des principes et des structures établies apparaissent comme des missions dont ces experts se sentent investis. Or les Français aiment les trublions parce que nous sommes des râleurs nés, critiquant toute forme d’autorité.

La seconde explication est la capacité de ses lanceurs d’alerte de jouer la provocation pour « agiter les consciences ». Irène Frachon et son « Mediator : combien de morts ? » s’inscrit parfaitement dans ce registre tout comme les professeurs Debré et Even et leurs 4000 médicaments inutiles et dangereux. Ce sont aussi ces rats atrophiés par des tumeurs monstrueuses exhibés sur tous les écrans de télévision qui semblent réveillés les consciences affaiblies et endormies de nos concitoyens. La provocation s’accompagne ainsi toujours du spectaculaire  : souvenons-nous de tous ces témoignages de victimes du Mediator (combien au juste ? : 200 selon les premières études, 500, 1500, 2000 selon le Figaro, personne n’en sait rien) qui se sont retrouvées malgré eux dans les colonnes de nos quotidiens. Cette provocation est donc un élément évident d’hypermédiatisation qui fait vendre des journaux, écouter la radio et regarder la télévision. Un bruit par ailleurs sans cesse relayé dans les médias sociaux.
 
On pourrait objecter à tout cela que les lanceurs d’alerte sont des contre-pouvoirs. Certes. Néanmoins, compte tenu des différentes polémiques qui ont suivi ces « révélations », chacun devrait sans doute faire preuve de davantage d’esprit critique, les médias en premier lieu. En effet avec un peu d’analyse et de recul sur l’actualité, chacun devrait pouvoir prendre le temps de réfléchir. Comment Messieurs Debré et Even ont-ils pu rédiger en si peu de temps un ouvrage si conséquent sur ces 4000 médicaments inutiles ? N’ont-ils pas été aidés par quelques nègres besogneux auxquels ils ont tenu la main ? N’ont-ils pas été forcément guidés par des intérêts bien supérieurs (ou terriblement quotidiens) en assurant une promotion hollywoodienne de leur livre comme le rappelle Le Monde ? Comment expliquer que le professeur député UMP Debré conserve son poste de chef d’urologie à Shanghaï ? 

Lorsque le Haut Conseil des Biotechnologies retoque l’étude Séralini, ce n’est pas pour défendre Monsanto, mais c’est bien pour « qu’une étude de long terme, indépendante, contradictoire et transparente, soit entreprise sous l’égide des pouvoirs publics quant à la sécurité sanitaire du maïs NK603. »
Lorsque l’ONIAM déboute 86% des dossiers des plaignants dans l’affaire du Mediator, c’est parce que le rapport de cause à effet n’est pas démontré. Et sur le même sujet, comment expliquer le terrible silence des cardiologues depuis les années 70 ?
A l’évidence, il faut des lanceurs d’alerte mais, pitié, permettez nous de juger sur pièce. L’argument d’autorité ne suffit plus à convaincre les consciences. Et le doute est toujours salutaire, que l’on s’appelle Debré, Even, Frachon, Séralini...
 
PS : quel sera le lanceur d’alerte pour l’affaire Eternit et le scandale de l’amiante ?
Sources :

dimanche 7 octobre 2012

En quoi les réseaux sociaux sont-ils un levier de la performance des entreprises françaises ?


Avec l'avènement du Web «social», Internet a plus évolué depuis cinq ans que pendant les quinze années précédentes. Le Web 2.0 constitue une révolution des usages et des potentialités. Les particuliers l'ont compris : 77% des internautes français utilisent quotidiennement, en moyenne, 2,8 réseaux sociaux.
Pourtant, l'entreprise semble hermétique à cette révolution. Une étude récente nous apprend que seulement 14% des sociétés de moins de 50 salariés (plus de 95% des entreprises françaises) sont présentes sur les réseaux sociaux. Ceci alors que la moitié des PME n'ont toujours pas de site Internet (enquête nationale de l'Association pour le développement de l'économie numérique en France, 26 janvier 2012). Si l'on met en regard de ces chiffres le fait que 73% du Web français n'est jamais mis à jour (enquête E-mail Brokers, novembre 2011), on peine à comprendre que les PME tardent à utiliser les réseaux sociaux, grâce auxquels il n'a jamais été aussi simple et rapide de publier une information.
En période de crise économique, la visibilité sur Internet et la capacité d'y trouver de nouveaux relais pour faire des affaires devient un enjeu crucial de compétitivité. Dans ce contexte, les entreprises doivent prendre le virage du Web social. A condition bien sûr d'utiliser les bons outils. Facebook ou Google sont inadaptés pour les PME en recherche d'outils B to B, ils n'y recruteront pas de nouveaux clients. Linked In ou Viadeo sont utiles aux entreprises en recherche de bons profils, mais présentent un risque de débauchage de leurs collaborateurs.
A côté de ces acteurs «historiques» se développent des innovations sociales sur le Web qui sont autant d'opportunités pour les entreprises, les associations et les professions libérales de développer leur activité et leurs réseaux. Ces innovations révolutionneront demain leur façon d'interagir les unes avec les autres et seront un indispensable levier de leur compétitivité pour trois raisons principales :
Amélioration de la productivité. Une étude McKinsey montre que la transposition au sein des entreprises de réseaux sociaux sur le modèle de Facebook permettrait d'accroître leur productivité de 20 à 25%. Les activités de marketing, de développement de produit, de vente et le service après-vente en bénéficieraient particulièrement, grâce à l'amélioration des processus collaboratifs au sein des entreprises et entre les entreprises partenaires. C'est par les réseaux sociaux B to B que se feront les mises en concurrence pour les appels d'offres. C'est aussi via les réseaux sociaux que les acteurs économiques feront connaître de façon ciblée leurs nouveaux produits et services. C'est enfin sur les réseaux sociaux que se mettront en place les plates-formes d'achat groupé.
Accélération de la dématérialisation. Les réseaux sociaux sont un outil extraordinaire pour dématérialiser son activité dès lors que la confidentialité et la sécurité sont respectées. L'expert-comptable peut partager via des plateformes collaboratives fiches de paie et bilans, ou l'agence de publicité ses fichiers d'exécution avec son imprimeur. Deux intérêts principaux pour l'entreprise : pas de limite de poids des fichiers et un contrôle absolu sur l'accès aux fichiers. Les solutions de stockage de documents en ligne, enjeu du «cloud», ne sauront se passer des réseaux sociaux, car le stockage des données ne peut plus être envisagé sans la question de leur partage. Bientôt, ce sont les devis et les factures qui seront dématérialisés, les réseaux sociaux permettant de les générer automatiquement. Ensuite, ce seront les paiements qui se feront sur ces plates-formes, permettant le paiement et le suivi des relations clients/fournisseurs en temps réel.
Développement de la visibilité sur le Web. Les réseaux sociaux sont une solution simple et peu coûteuse pour maximiser son référencement. Un profil d'entreprise sur un réseau social est souvent plus payant en termes de référencement que son propre site Internet ! Un réseau social professionnel présente aussi des avantages considérables par rapport aux annuaires professionnels de référence : il est mis à jour en temps réel par l'utilisateur. Surtout, les réseaux sociaux professionnels sont désormais à considérer comme des annuaires qualifiés pour chaque utilisateur, qui construit petit à petit son carnet d'adresses personnel à partir de la base de données du réseau social, son réseau devenant une source qualifiée de prospection.
Convaincre les chefs d'entreprise que l'utilisation raisonnée et pensée des réseaux sociaux sera bientôt indispensable à leur développement, et même à leur survie, est un enjeu qui doit être soutenu par les pouvoirs publics. Le gouvernement français, en rassemblant PME, innovation et numérique dans un même ministère, a montré une acuité certaine sur le sujet. Il convient maintenant de soutenir l'innovation pour permettre de développer des solutions d'avenir qui permettront – enfin – aux entreprises françaises de profiter de ces nouveaux leviers de compétitivité.
Sources :