jeudi 29 mars 2012

Le « fast-checking » ou l’art de vérifier les faits


Les médias français étant ce qu’ils sont, il était nécessaire de se tourner une nouvelle fois outre-atlantique pour trouver une parade à ce désamour quotidien des français envers leurs supports de communication. 
A l’origine, le « fast-checking » consiste à une vérification des faits et des chiffres dans les discours politiques. Depuis 2008 le principe s’est emparé des médias français. Multiplication des blogs (Les décodeurs du Monde, Les Pinocchios de l’Obs, le détecteur de mensonge du jdd.fr…), des émissions télé comme Véritomètre d’I-Télé.
Comme les politiques, les médias sont bien obligés de retrouver un peu de crédibilité face au nombre de d’erreurs et d’inexactitudes qui remplissent quotidiennement journaux et magazines Il s’agit donc pour eux de vérifier, contrôler, évaluer les paroles de politiques mais aussi, et c’est sans doute assez nouveau, ce que disent d’autres médias. Comme si tout le monde s’épiait et dénombrait les erreurs des voisins.
L’idée est néanmoins intéressante. S’il existait un vrai journalisme citoyen dans notre pays (on regrette encore la disparition du Post.fr), chacun pourrait rêver de « fast-checker » ce que nous disent les médias. Sans doute, ils nous auraient évité le faux massacre de Timisoara, la fille du RER C, les fausses perquisitions, les faux témoins, l’affaire d’Outreau, les fausses révélations, la fausse mort de Pascal Sevran et du petit Louis, on en oublie, tout cela asséné par des journalistes convaincus de leur juste droit, plaçant l’approximation de langage (Zadig et Voltaire de Lefèbvre) au même niveau que le scandaleux DSK. Persuadé qu’un journaliste doit tout savoir, tout dire, même au détriment de la plus élémentaire vérification des faits,  les médias ronronnent leurs propres erreurs jusqu’à l’inflation, reprennent l’approximation d’autrui de peur de  passer à côté d’une information de première main. Tant par facilité que par recherche du scoop, ces « journaleux » scient la branche sur laquelle ils sont assis.
Le « fast-checking » doit être, plus que jamais, déclaré d’intérêt médiatique…

dimanche 4 mars 2012

Vers "l'escroquerie journalistique"...

Il semblerait qu'il existe depuis de nombreuses années un profond malaise dans notre profession de journalistes. A lire les essais des uns et des autres, et pas des moindres, (Joffrin, Plenel), à constater l'invention d'une nouvelle forme de journalisme (Slate, Agora, Mediapart), le modèle traditionnel de l'information semble en péril. La collusion trop souvent dénoncée entre propriétaires de médias et rédactions fait cependant long feu. Ainsi il faut lire l'entretien accordé à Libération de Jean Quatremer, journaliste à... Libération, qui publie d'ailleurs un livre "Sexe, mensonges et médias" (Plon).
Retenons la jolie expression "d'escroquerie journalistique". Il semble que nos quotidiens en soient remplis. Présenter des informations à charge alors que rien ne le justifie et ne l'étaie, multiplier les bidonnages pour faire de l'audience, retoucher des photos pour faire plus net, résumer à l'excès des déclarations, sortir une phrase de son contexte, autant de pratiques délictueuses présentes depuis de nombreuses années, depuis en fait l’émergence d'une presse qui a perdu ses opinions.
Car il me paraît évident que, tant que les journalistes n'auront pas retrouvé le sens profond de leur métier, c'est-à-dire l'investigation au service d'une objectivité rationnelle, les dérives et les déviances journalistiques se multiplieront. Très curieusement d'ailleurs, on parle peu des "ménages" que réalisent mes confrères en se transformant en conseiller en communication. Ici c'est pour un leader de l'agro-alimentaire, là pour un laboratoire pharmaceutique ou encore un constructeur automobile. Les journalistes perdent leur âme à trop vouloir exister en dehors de leur rédaction.
Seule une profonde révolution culturelle du métier de journaliste pourra limiter, comme dans les pays anglo-saxons, le pouvoir des propriétaires de l'information. A moins que ces derniers ne fassent plus que cela, comme Murdoch. Difficile en effet de vendre des armes ou des technologies et posséder des quotidiens car le conflit d'intérêt est toujours présent. Aux journalistes de choisir leur camp...