Toutes les
entreprises sont désormais confrontées à un enjeu d’un nouveau genre :
préserver sa réputation sur les réseaux sociaux. Avec plus ou moins de réussite.
Autrefois il fallait que les
grandes entreprises préservent à tout prix leur réputation : elles
déployaient des efforts significatifs en terme d’événementiels, de relations
presse, de lobbying... Elles choyaient leur actionnariat et les politiques. Si
les très grandes entreprises ont rapidement compris quels risques elles
encouraient avec l’émergence exponentielle des réseaux sociaux (et parce
qu’elles en ont aussi les moyens financiers), la majorité des entreprises,
grandes et petites, sont totalement ignorantes de ce qui se passe sur internet.
D’un côté des entreprises qui apprivoisent peu à peu à maîtriser le digital, de
l’autre des millions de consommateurs qui n’ont plus peur de prendre la parole
sur Internet. D’ailleurs, combien de fois entendons-nous « Internet ? Twitter ? Non, merci,
trop compliqué pour nous ! ». Ou bien nous assistons à des
ouvertures de pages institutionnelles qui demeurent à jamais vides… L’ignorance
est souvent flagrante dans le management d’entreprises qui, culturellement, n’a
pas été préparé ni formé ni à la communication corporate ni aux
« conversations » sur internet.
Le temps des
médias sociaux n’est pas le temps de l’entreprise
Quelque soit le type
d’entreprise, le risque d’e-réputation est une réalité bien tangible,
quantifiable et mesurable. Toutes les organisations sont exposées, malgré
elles, à des prises de positions, à des avis de consommateurs, à des clients,
au regard des concurrents. Tout se voit désormais sur la toile. Les bonnes
comme les mauvaises communications et l’absence de communication digitale…
Toutes les entreprises sont
aujourd’hui exposées à un bad buzz
comme à un good buzz. Ne pas prendre
la réelle dimension des influences qui se jouent sur internet, c’est être sourd
et aveugle. Des experts parlent même de « reputation war » comme si,
aujourd’hui tout se jouait dans un monde hyper concurrentiel et totalement
libre, ouvert, comme si une guérilla était en mesure, en quelques clics, de
réduire à néant une réputation. Se priver d’écoute, de veille, de compréhension
des échanges, d’analyser ses propres expériences et celles de ses concurrents,
qui se déroulent en temps réel sous les yeux des entreprises, c’est, sans aucun
doute, se priver de potentialités économiques évidentes. Les 3 Suisses l’ont
compris à leur dépend. Quick est intervenu en direct sur Facebook après la
crise du restaurant d’Avignon. Le temps des réseaux sociaux n’est pas le temps
de l’entreprise. Il va trop vite alors que l’entreprise a besoin de réflexion
et d’analyse.
Je twitte
donc je suis
Le citoyen a changé son
rapport aux entreprises. Il peut désormais s’adresser à elles sans aucun
complexe. Le marketing y a trouvé son compte et a su développer le marketing de
la recommandation. Chaque consommateur devient à son tour une référence pour
ses amis. Je twitte, donc je suis. Je suis libre de choisir, critiquer,
vilipender une marque, un produit, une institution, un homme politique. En
l’espace de quelques secondes, le buzz se développe sur la toile à grande
vitesse si, bien entendu, c’est drôle, atypique, hors norme, contestataire. Les
comportements changent et induisent pour les entreprises de modifier aussi
leurs comportements face à ces consom’acteurs
virulents et engagés. L’écho dans les réseaux sociaux est sans limite et d’une
mémoire prodigieuse, puisque tout reste ancré, comme figé dans les méandres
d’un big brother insaisissable.
Le citoyen réclame de
l’attention, voire de la considération et propulse son problème ou sa question
personnelle dans un débat multiple. Toutes les crises de société comme les
crises de santé publique sont là pour en témoigner. Pilules de 3ème
et 4ème génération, prothèse PIP, dangerosité de certains
médicaments, sont autant de mobilisations fugaces mais réelles. Le consommateur
a donc une réalité ! Il est aujourd’hui expert en commerce équitable, il
est spécialiste de relations sociales, il est sélectionneur, il est politique, il
est juge. C’est sans doute là que le risque pour les entreprises est le plus
grand. Orchestré probablement par des community
manager zélés, pilotés par des agences spécialisées, le bad buzz est une vraie stratégie
d’influence. Son rôle est de rallier des citoyens, des patients, des
consommateurs pour conspuer sans discernement une entreprise sous tous les
registres. Il faut faire du volume pour dénigrer. Même la justice se sent
débordée par les dénigrements répétés, les circulations de fausses rumeurs,
l’abjection et la haine conjuguée comme dans l’affaire de l’UEJF et
Twitter. Des initiatives se développent pour contrer ces very bad buzz. Ainsi le blog Présumé innocent lancé par un ténor du barreau
qui a choisi internet pour redonner la parole à tous ceux qui, sur les forums,
les réseaux sociaux et les médias traditionnels sont déjà condamnés avant même
que la justice ne passe.
Une guerre
d’influence
C’est une vraie guerre de
l’influence, avec aussi, ses dommages collatéraux. Les spécialistes parlent de
sociabilisation, de mécontentement endémique, de distraction (pour faire comme
tout le monde). Mais combien de milliers de citoyens ou de consommateurs ne
reçoivent jamais de réponse à leurs sollicitations ? Pourtant la veille sur
internet est devenue un enjeu fondamental pour les entreprises. Qui parle,
comment, sur quel ton, quels sont les e-influencers ?
Tous les outils existent aujourd’hui pour connaître ce public étrange. La
réputation se construit aujourd’hui au nombre de clics, aux opinions partagées,
aux rumeurs. Les entreprises doivent en avoir conscience et s’y préparer.
Cette guerre de la réputation
ne doit cependant pas remplacer les anciennes actions qui construisaient
l’image de l’entreprise. L’engagement sur internet et sur les médias sociaux
vient en complément, voire renforce les actions développées traditionnellement.
En cas de bad buzz, les entreprises
doivent surtout écouter, analyser et comprendre le phénomène. Ont-elles le
temps ? Néanmoins le bruit sur internet disparaît aussi vite qu’il
apparaît. Mais il implique, quelque soit la forme qu’il prend, une réponse de
l’entreprise. Il faut donc raison garder. Internet pour l’entreprise, est un
peu comme la langue d’Esope : la meilleure et la pire des choses…
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