Après l’arrêt de la version papier du
trimestriel Médias et du quotidien La Tribune, la disparition totale de France-Soir, l’industrie des médias
connaît une tempête sans précédent. La faute à qui ?
Le chiffre est tombé des analyses de la COFACE :
le nombre de défaillances des entreprises sera de 4% en 2012 et le coût de
celles-ci est en augmentation de 12%.
Le secteur des médias est tout particulièrement touché. Après l’arrêt
du quotidien La Tribune en version
papier, qui a entraîné le licenciement sec de 110 personnes, la mise en
redressement judiciaire de France Soir puis son arrêt définitif (142 licenciements), la fermeture de
l’édition du trimestriel Médias et sa volonté de développer
son édition numérique, c’est au tour du groupe Hersant Media (GHM) de peser sur
la facture sociale de la presse quotidienne.
Le groupe GHM emploie 650 salariés principalement dans le nord-est de
la France (L’Union-L’Ardennais, l’union de Reims, Libération Champagne, l’Aisne
Nouvelle). Les négociations avec le groupe belge Rossel, qui s’était porté
acquéreur, ont échoué. Seul le pôle normand de GHM est mieux loti : Paris-Normandie vient de trouver
acquéreur en la personne de deux journalistes (Xavier Elie et Denis Huertas).
Une restructuration est aussi attendue chez TF1 où 300 emplois seraient
menacés selon l’Express. L’imprimerie du Monde (Ivry-sur-Seine)
ne devrait bientôt fonctionnée qu’avec 70 salariés et une rotative contre 270
salariés actuellement. Des discussions sont en cours pour sous-traiter
l’impression à Ouest-France et
d’Ebra, ou à Riccobono qui dispose d’unités décentralisées de la PQN.
Enfin, à Presstalis (ex NMPP), entreprise de distribution de la presse,
la CGT parle de la
perte potentielle de 1000 emplois.
A qui la faute ?
Plusieurs raisons structurelles et économiques sont à l’origine de se
resserrement de la presse dans son ensemble. Tout d’abord, la crise économique
contraint les annonceurs à réduire leurs achats d’espace dans les supports
médias, principale source de revenus pour ceux-ci. Ainsi, selon Kantar Media, les investissements
publicitaires pour le mois de mai 2012 ont été en retrait de 9,1% par rapport à
ceux de mai 2011. Tous les médias ont vu leurs investissements publicitaires
diminuer. Les reculs les plus significatifs sont enregistrés dans la presse
(-10%), notamment pour les quotidiens nationaux (-18,4%), à la télévision
(-5,9%), en particulier les chaînes «historiques» (-10,5%), et en communication
extérieure (-18,5%).
Ensuite la concurrence de nouveaux formats d’information pèse sur la
diffusion traditionnelle : l’émergence des réseaux sociaux, la mise en
ligne gratuite d’informations (Slate par exemple) ou orientée
pédagogie (Quoi ? l’actu expliquée), ou
encore citoyenne (Agoravox, Rue89). Cette multiplication des supports
conduit à un éclatement des offres, certes plus ciblées mais beaucoup moins
homogènes qu’auparavant. Seuls les très gros annonceurs peuvent encore conduire
des actions de type 360°, c’est-à-dire investir largement dans le multi
supports.
Enfin, la faute relève des médias eux-mêmes. Le développement du
spectaculaire au détriment de l’information objective et vérifiée, la
multiplication des partis pris non argumentés, la profusion de débats stériles
et d’une redoutable inutilité (en particulier sur les chaines d’informations en
continu), des lignes rédactionnelles quelconques, tous ces critères nuisent
globalement aux médias. Le LAT (lecteur, auditeur, téléspectateur) a pris
l’habitude de zapper d’une information (si c’est une information !) à une
autre pour, in fine, ne rien retenir
et trouver refuge dans les médias sociaux.
De plus, la collusion pouvoir politique et pouvoir médiatique (la fameuse
médiacratie) plombe durablement la perception des LAT et inspire davantage de
méfiance que de compréhension.
Demain ?
L’avenir est sans doute sombre pour les médias classiques, même s’ils
ont développé des efforts pour investir tous les supports. Il conviendra
probablement de faire preuve de beaucoup plus de conviction dans les rédactions
pour retrouver des LAT. L’histoire enseigne pourtant, qu’avant la seconde
guerre mondiale, la France occupait une place de choix dans la liberté
d’expression et que les quotidiens exprimaient volontiers leurs convictions et
leurs engagements politiques, sans concession, ni servilité. Peut-être que les
médias français devraient s’inspirer de leur propre histoire.
Sources :
http://www.coface.fr/CofacePortal/FR_fr_FR/pages/home/publications/panorama-defaillances-entreprises
http://www.agoravox.fr/
http://www.rue89.com/
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